Grand Magal de Touba
Le Magal de Touba est la commémoration du départ en exil de Ahmadou Bamba au Gabon. Cette fête religieuse date de la naissance de la confrérie, au XIXe siècle. Étymologiquement, magal est un terme wolof qui signifie « rendre hommage, célébrer, magnifier ».



Genèse du Grand Magal
C'est dans un contexte particulièrement difficile et défavorable à l'Islam et hostile au développement personnel et à l'épanouissement spirituel que Cheikh Ahmadou Bamba a choisi de s'engager dans le sacrifice de sa personne, pour glaner une haute distinction auprès de son Seigneur, pour réhabiliter l'Islam de la façon la plus authentique en acceptant de porter le fardeau, le flambeau de l'Islam pour élever la voix de Dieu et pour le bonheur des siens (pour demeurer l'Intercesseur de son peuple).
C'est la raison pour laquelle Cheikh Ahmadou Bamba a signé le pacte devant le Prophète (PSL) et sa Garde Rapprochée dans les dix derniers jours du mois de Ramadan de l'an 1312H (1895) à la mosquée de Darou Quddus. Il accepta les clauses du contrat qui étaient de supporter vaillamment une somme d'épreuves ou une série de condamnations à mort qui n'acceptait ni recul ni gémissement mais aussi sans effusion de sang.
De ce fait, Cheikh Ahmadou Bamba devait être mis en confrontation avec ses ennemis contemporains, c'est pour cela, à l'issue de son entretien avec le Prophète (PSL), il alla juste après la korité à Mbacké Baary à la rencontre du destin qu'il avait choisi lui-même en attendant le décret divin ou le signal divin du début de la mission.
C'est pourquoi l'arrestation orchestrée par l'Administration Coloniale et l'exil au Gabon dont il fut victime sont une réalisation, une matérialisation de son vœu le plus cher exaucé par son Seigneur. C'est pourquoi il considéra ce jour 18 Safar 1313 H (10 août 1895) comme une délivrance et choisit ainsi cette date du 18 safar qui marque le début des épreuves comme son jour d'action de grâce.
Après 33 ans de privation de liberté, de brimades, d'exactions, d'humiliations, d'agressions physiques et spirituelles, de sévices et de supplices à travers des exils iniques et pénibles au Gabon (un peu moins de 8 mois) et en Mauritanie (4 ans suivis des résidences surveillées à Thiéyéne Djolof et à Diourbel, Cheikh Ahmadou Bamba est revenu saint et sauf, auréolé de sainteté et de gloire.
La fin des épreuves
Un mardi, 18ème jour de safar en 1921 (1399 H) alors qu'il était en résidence surveillée à Diourbel, le Cheikh attendait les épreuves comme à l'accoutumée, le Seigneur qui multipliait les épreuves qu'il lui faisait subir en ce jour, lui fit savoir que les épreuves sont terminées, la peine est levée et que toute la mission qui lui avait été assignée a été accomplie. En d'autres termes, il a entièrement payé le prix de tout ce à quoi il aspirait, il ne restait que la rétribution et l'action de grâce. En effet, la grandeur de la récompense va de pair avec la lourdeur de l'épreuve.
Après cela, Cheikh Ahmadou Bamba les regroupa et leur déclara publiquement ce qui suit en présence de Serigne Balla Faly Dieng, Serigne Hamzatou Diakhaté pour ne citer que ces deux : « Quant aux bienfaits que Dieu m'a accordés, ma seule et souveraine gratitude ne les couvre plus. Par conséquent, J'invite toute personne que mon bonheur personnel réjouirait de s'unir à moi dans la reconnaissance que je témoigne à Dieu, de s'associer à moi dans l'action de rendre grâce à mon Seigneur chaque fois que l'anniversaire de mon départ d'exil le trouvera sur terre. Il donna recommandation de faire un sacrifice des espèces allant du coq au chameau. Que chacun s'y investisse selon ses moyens ». C'est ainsi que les disciples commencèrent à l'appeler « fête de Tabaski bis » (« Tabaskiwaat ») et lorsque le Cheikh l'entendit, il leur interdit cette appellation pour éviter toute innovation blâmable (Bida).
Un éleveur de l'ethnie sérère qui habitait à Mboudaye dans les environs de Diourbel lui avait offert une chèvre en guise de don pieux (Hadiya). Le Cheikh l'échangea avec un bélier et demanda à Serigne Moulaye Bousso fils de Serigne Mbacké Bousso disciple de première heure du Cheikh d'immoler le bélier et de partager la viande en trois parts égales et de la distribuer une à Sokhna Aminata Bousso, une autre à Sokhna Anta Ballé Bousso sœur cadette de cette dernière et la 3ème part à la Daara de Serigne Moulaye Bousso.
C'est Serigne Mouhamadou Fadal Mbacké, le deuxième Khalif qui a eu l'honneur d'être le premier à faire une invite généralisée à l'ensemble des disciples de Serigne Touba de venir commémorer le départ d'exil du Cheikh (Magal), cette occasion de rendre grâce à Dieu à Touba en 1947 dans le but de rassembler et de mobiliser les disciples (la grande retrouvaille) pour développer la ville sainte en parachevant tous les grands projets de la voie mouride (Grande Mosquée de Touba).
C'est dans ce sens qu'il leur fit savoir ceci : « je ne dis pas que le Magal a plus de bénédiction que laïd el kébir mais pour vous (disciples mourides), il est meilleur. C'est pourquoi, il leur recommanda de l'appeler « Magal » (un terme wolof qui signifie célébrer, occasion de rendre grâce à Dieu).
Le Cheikh est l'artisan de cet évènement, il est le premier à le célébrer et a donné le ton sur cette occasion de rendre grâce à Dieu avant de recommander à l'ensemble des disciples de la célébrer chacun chez soi et selon ses moyens.
Il dira également : « étant deux personnes, si l'une prend en haute considération ce jour et l'autre le néglige, celui qui lui voue de la considération ne cessera jamais de voir les titres de prééminence qu'il a sur l'autre ».
La célébration du Magal par les successeurs du Cheikh
Le premier successeur du Cheikh, Serigne Mouhamadou Moustapha Mbacké a perpétué cette recommandation de son vénéré père en réitérant l'appel portant sur le Magal mais en demandant à chacun de célébrer le Magal chez soi comme à l'accoutumée.
Tous les khalifes qui lui ont succédé ont également renouvelé et perpétué cet appel populaire du Magal dans la cité religieuse pour faire de cette dernière une ville moderne en invitant les disciples mourides à l'adoration et au culte du travail (œuvrer au service de Borom Touba (Khidma)).
Le Magal repose sur trois piliers
- La reconnaissance ou l'action de grâce
La gratitude peut se diviser en trois catégories :
- La gratitude par la langue
- La gratitude par le cœur
- La gratitude par les sens (les actions)
- L'adoration de Dieu célébrer en se conformant aux règles édictées par l'islam (prières rituelles, lecture du Coran et des Panégyriques du Cheikh)
- Les réjouissances (offrir le meilleur accueil aux hôtes, l'hébergement, l'honneur et leur donner à manger et à boire pour la gloire de Dieu)
Signification et importance
Le Grand Magal de Touba est l'événement le plus important du calendrier mouride. Il commémore le départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba au Gabon, ordonné par l'administration coloniale française en 1895. Plutôt que de considérer cet exil comme une épreuve, Cheikh Ahmadou Bamba l'a perçu comme une opportunité de se rapprocher d'Allah et d'accomplir sa mission spirituelle loin des distractions.
Cette célébration est l'occasion pour les disciples mourides de rendre grâce à Dieu, de réciter le Coran et les Khassaïdes, de partager des repas et de renouveler leur engagement spirituel. C'est également un moment de retrouvailles familiales et communautaires.
Déroulement des festivités
Le Grand Magal dure officiellement deux jours, mais les célébrations s'étendent souvent sur une semaine entière. Des millions de pèlerins convergent vers Touba, transformant la ville sainte en l'une des plus peuplées du Sénégal pendant cette période.
Les principales activités comprennent :
- Ziar (visite) : Visite au mausolée de Cheikh Ahmadou Bamba et aux résidences des califes et dignitaires mourides
- Récitations : Lectures collectives du Coran et des Khassaïdes
- Berndé (repas) : Partage de repas communautaires offerts par les familles et les dahiras (associations mourides)
- Conférences : Discussions sur la vie et l'œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba
- Prières : Prières collectives à la Grande Mosquée de Touba
Un rassemblement d'envergure mondiale
Le Grand Magal de Touba est l'un des plus grands rassemblements religieux au monde, attirant entre 3 et 5 millions de pèlerins chaque année. Des mourides venant des quatre coins du globe se réunissent à Touba pour participer à cet événement spirituel majeur.
Au-delà de sa dimension religieuse, le Grand Magal est également un phénomène social et économique important pour le Sénégal. Il mobilise d'importantes ressources logistiques et génère une activité économique considérable.
Informations pratiques
- Date : 18ème jour du mois de Safar dans le calendrier musulman (date variable dans le calendrier grégorien)
- Lieu : Touba, Sénégal